• Argument

     

    Le présent "Carnet" (recherches, remarques, réflexions) s'impose de marquer la traçabilité du cheminement. Il fait écho à une attitude de base en pratique professionnelle de la pédagogie. Mais l'"âge du capitaine" lui permet de se lâcher, et de ne rendre à personne les comptes obséquieux qui entravent la pensée.

     

    Bitche Juin 2012 090          Le globe de cristal. Photo : Jean Agnès

    Concernant l'origine d'une recherche en pédagogie, elle est datée et double.

    D'abord, la posture d'enseignement, alimentée par les données des sciences humaines, pour ce que je puis en connaître, à la fois dans la formation initiale, comme le généraliste, et mieux si possible le spécialiste, et comme souhaitable formé tout au long de la vie... Ainsi d'une utopie réaliste du parcours enseignant.

    On voit ici toutefois quelles sont les "apories de fait" auxquelles se heurtent ces idées simples.

    Se former tout au long de la vie est un noble dessein. Il est en pratique, et pour des raisons de fonctionnement idéologique de l'employeur scolaire, très difficile à mettre en oeuvre, sinon au prix d'un effort auquel peu d'entre nous consentent. - ou que nous ne pouvons viser réellement sans affronter de grandes difficultés.

    La formation initiale en sciences humaines est évidemment souhaitable, et une formation trop tôt spécialisée est une ânerie - bridant la curiosité. Elle a pourtant pour l'enseignement une forte valeur ajoutée, car elle alimente de manière précise et critique l'action pédagogique. On aurait par exemple évité bien des faux-débats et des passes d'armes piteuses d'opinions hâtives, sinon de déversoirs de préjugés, sur les apprentissages de la lecture et de l'écriture si on s'était renseigné à un peu de linguistique sérieuse. 

    Telle est donc la première préoccupation : celle d'un métier d'enseignement nourri par la préoccupation de la rationalité et de la pensée critique, et non soumis à des directives administratives, qui sont d'un autre ordre.

    Flashback

    La seconde interrogation vient pour moi dans le contexte de difficultés de conception de la formation à une grande échelle, s'agissant d'organisation et d'activité publique (dans mon cas, le cadre d'un grand établissement sous tutelle spécialisé dans le rapport de l'éducation scolaire aux médias, à l'époque en construction). Chacun voit bien ce que l'injonction politique et les pressions de la doxa imposent à la définition des principes d'action. Dès lors que l'on multipliait les actions et leur promotion (au point que la promotion finit par l'emporter sur la réalité de l'action) sans en maîtriser l'analyse, puis sans en référer aux fondements, ni à un horizon de sens, l'ensemble s'alourdit, s'appauvrit et se soumet.

    Dans ces circonstances déjà anciennes, m'apparaissait la nécessité d'un effort de philosophie de l'action éducative, capable d'interroger la pratique, de la mettre en perspective... Cette posture est actuellement incompatible avec les principes et les fonctions d'un tel organisme lié au pouvoir.  Elle est par ailleurs à ne pas confondre avec la tentation du "supplément d'âme", qui vient en surplus, et le plus souvent, en interrogation au futur, en conclusion d'un article ou d'un colloque, selon les règles de la bonne vieille dissertation sans engagement.

     

    Cette impulsion initiale à la préoccupation de "philosophie de la pratique éducative"[1] ouvrait à mes yeux trois directions de travail :

    - les conditions méthodologiques de la possibilité de la posture d'articulation entre différents niveaux de la réflexivité professionnelle ;

    - la recherche en définition d'un philosophie de l'éducation liée aux questions du "milieu de vie"

    - la spécificité de cette posture dans le rapport entre philosophie et anthropologie.

     

     Ces questions sont anciennes. Un point d'étape s'impose. il se fera en liaison avec le site Phileduc, si celui-ci finit par rejoindre une nécessité collective en "philosophie de l’éducation" pour notre temps, ce qui est loin d'être gagné.

     

    Concernant l'actualité

    Un tel carnet de notes individuel rend compte aussi de la réflexion subjective. Elle est chez moi-je de mauvaise foi, car elle s’oppose souvent aux idées reçues, aux certitudes des clans, aux prétentions des pouvoirs. Cela permet des digressions variées, allant de l’article (ou de la reproduction d’articles ailleurs publiés) à l'abréaction, rendue nécessaire par tant de stupidités cumulées, en tous cas dans les domaines que nous connaissons un peu.

    Profitons de l'hiver et de son immobilité. Mais au-delà de ce deuil, il faut toujours se préparer : la période de paralysie de la pensée, notamment la pensée éducative (pour ce que j'en connais dans le monde francophone) n'est peut-être pas fixée pour l'éternité.

     

    Jean Agnès

     

     


    [1] « En réalité, il n’y a pour ainsi dire jamais eu de philosophie de la pratique éducative », écrira plus tard Marcel Gauchet (Pour un philosophie de l’éducation, 2002.- p. 15). v. la Bibliographie

     

     

     

     

     

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