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Le mode Ē (non-É)
À propos du mode Ē (non-É)
Le Dragon de Calais, 2019
Les événements (littéraires, artistiques, éducatifs, anthropologiques, philosophiques ) auxquels nous avons été mêlés ce dernier siècle nous incitent à penser qu'une autre manière de comprendre la production textuelle est possible.
La conception en vigueur présente quelques caractéristiques remarquables : par exemple, apologie de l'individu en soumission morale ; croyance à l’œuvre comme objet fini et clos ; valorisation des productions par la systémique des hiérarchisations et du marché. Ad libitum.
Nous avons à maintes reprises éprouvé la possibilité d'un espace différent, en rupture avec la doxa et l'idéologie dominantes. Les expériences en ce sens que nous avons pu mener sporadiquement ont fait long feu : ce n'est pas pour autant qu'elles étaient insensées, mais contraires à ce que les pouvoirs attendent et supportent. L'utopie en est réaliste, mais elle est indéfiniment combattue.
Pourtant, plusieurs considérations aiguillonnent l'imagination, sollicitent l'invention de formes inédites. Le changement de paradigme global, les nouvelles donnes, la conscience mésologique, la nécessité de frugalité.
Édition Ē (non-É)
Dès lors, il est possible de concevoir d'autres moyens de circulation des idées et des travaux que celui de la « galaxie Gutenberg » et de l'ordre néocapitaliste.
Un univers de génération des idées non-marchand, non-hiérarchique, non-doctrinaire, est-il concevable ?
Nous avons proposé le mode d'Édition Ē (non-É) qui réunit quelques caractéristiques opposées à l'ordre idéologique en vigueur : Gratuité, Disponibilité, Communauté. A la croyance, répondre par la Rationalité, à la fixité par la Temporarité. Etc.
Mais cette aspiration à échapper à l'univers fermé qui nous est donné à vénérer ne va pas de soi. Elle suppose de rompre avec la coutume, et de porter une attention redoublée aux maximes de nos actions.
Formes et genres
La vaine discussion qui opposa naguère les modes traditionnels d'édition imprimée, et la conquête des « nouveaux supports », n'est pas de mise. Le livre est jouissif. Il ne peut être supplanté par quelque écran. Cela n'a rien à voir. Nous avançons ici un principe simple : à chaque type de texte son mode d'édition. Le bel ouvrage, le beau livre, le bouquin à feuilleter, ne sont pas remplaçables. C'est pourquoi nous restons libraires !
Et nous nous porterions mieux en procédant à quelque distinctions : tout un matériel éditorial n'a plus besoin de l'imprimé.
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Écologiquement, la question reste délicate. Les data centers sont des gouffres énergétiques. Nous restons dans l'illusion d'une impossible gratuité. Ce sont des limites dont il faut prendre la mesure.
Reste qu'il ne nous est pas interdit théoriquement d'entreprendre. Et d'imaginer que quelque liberté inédite est possible.
Tags : mode Ē (non-E), édition, marché, hiérarchie