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Un monde sans alternative
Le pathétique contemporain, et non le tragique tant que la tendance en cours n'est pas parvenue à un accomplissement dystopique, tient, en éducation scolaire, à l'absence d'autre monde.
Ici, le soleil tourne toujours autour de la terre, l'insconscient et la structure ne sont jamais apparues sur terre, le boson n'existe pas, et la théorie critique est à ranger au rang des vieilleries, ou à brûler parmi les Vanités.
Dans le domaine que j'ai quelque peu fréquenté, et auquel je suis retourné jeter un coup d'oeil, théorétique pédagogique et histoire comparative obligent, qui est celui des milieux de vie, l'engouement entropique pour les espaces du "numérique" donne lieu à quelques conversions, positionnements et autres rétro-prophétismes .
Ce qui frappe dans les proclamations des spécialistes du genre (les piliers "experts" institutionnels tous genres confondus) c'est leur caractère d'univocité. Profonde.
Discursive, d'abord, parce que le propos n'est pas éclairé par une théorétique suffisante ; qu'il s'est appauvri et raidi, faute d'inscription historiques (le présentisme) et de références expérientielles (l'in-transmission) suffisantes ; et qu'il n'est mis en jeu dans aucune controverse ; politique ensuite, car il n'y a pratiquement pas d'alternative au discours du pouvoir, entre les décideurs, les porteurs d'opinion et les brigades laïques chargées au mieux d'un peu de poil à gratter. Surtout ne pas fâcher le Prince ni toucher aux fondements du système.
C'est bien sûr une situation extrêmement préoccupante pour l'esprit, comme l'est l'absence de statut de la philosophie de l'éducation et de la pédagogie elles-mêmes dans les contorsions actuelles autour des "éducation à".
On pourrait espérer qu'il ne s'agit que d'un mal franco-français, attaché à la "philosophie nationale" englobante et crispée. Rien n'est moins sûr. En attendant, si on ne sort pas de cette situation figée, nous allons inexorablement vers quelques abrutissements d'un nouveau genre. Il est fort dommage que les "penseurs" se soient absentés sur ces questions ("non merci", "je suis très pris", "excusez-moi"), qui ne sont précisément guère... "questionnées". Si bien que comme il n'y a guère de pilote ni de synthèse, il n'y a pas non plus d'autorité critique.
Ce qui est en jeu, c'est bien une vision de l'homme et du type de société. Pourquoi pas un tel endormissement dans ce "meilleur des mondes" ? Mais à quel prix ?
Tags : dystopie, milieux, unidimensionnel, monde scolaire