• Le problème à propos de la question du "Journal scolaire", c'est bien entendu le sens pédagogique.

     

    Le Journal Scolaire

    Célestin Freinet, Le Journal scolaire, 1957

     

    Aucune activité, et singulièrement celle-ci, n'a de sens pour elle-même, en dehors de la visée pédagogique qui la sous-tend. Or, il s'agit d'une notion-clé, qui en focalise bien d'autres.  

    Il y a eu un moment fort dans la question, qui correspond à la conception de Célestin Freinet. Il s'agit d'une vision riche et profonde, intégrée, à l'opposé de ce qui se clone à l'infini sous forme convenue, purement pratique, asséchée, sans finalité. C'est là sans doute une des conséquences lamentables du travail mené par l'institution - notamment sous prétexte de l'hyperslogan de l'"éducation aux médias", pour désamorcer et stériliser tout ce que les messages du mouvement de l’éducation nouvelle contenaient de force et d'idéal.

    D'autres pédagogues sont allés dans ce sens, d'une participation intelligente et active de la communauté éducative, élèves compris, à sa propre instruction. Sans pour autant se targuer d'un label particulier. Mais toujours en se réclamant d'une pédagogie fondée.

    Le drame aujourd'hui est le suivant : qu'en disent ceux-là mêmes qui se se réclament de l'héritage de Freinet ? On se heurte en effet aujourd'hui chez les néo-technicistes à la promotion stupide du "journal scolaire", comme exercice scolariste, asséché, non-motivé, déraciné.

    Exemples d'abonder. A l'opposé bien entendu du formidable message de "l'Imprimerie à l'école".

    Qu'en pensent les tenants du mouvement "Freinet", en principe aux avant-postes sur ces questions ? Aux dernières nouvelles, ça ne les intéresse pas. Et c'est pour moi encore une désillusion, sinon une surprise.

     

     

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  • ... les trublions ?

     

    Où sont passés...

    Au jour ce ce jour, on ne voit nulle part pointer d'action relative à l'école française qui puisse en quoi que ce soit déstabiliser la belle ordonnance de la distribution scolaire.

    Les dernières nouvelles ne sont pas bonnes : aucune tentative n'est en cours, qui échappe à la stratégie d'"appareil-réseau" des organisations complémentaires de l’éducation nationale.

    "Complémentaire" est le terme approprié : il ne s'agit pas de contrecarrer mais de "s'inscrire en marge" de la politique dominante.

    Pire : le conglomérat de groupements auto-alimentés absorbe et mélange allègrement les genres, les niveaux, les problèmes. Il ne peut rien sortir de cette potion, sinon un goût amer.

    ***

    Évidemment, au train où vont les choses, les tenants de l'ordre établi ne peuvent que se réjouir, et dormir sur leurs deux oreilles.

     

     

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  • Les apparents tumultes du moment ne sont pas ceux des grands enchaînements : ce sont plutôt des agitations provoquées par la pression des évolutions et des mouvements internes à la mutation en cours.

    L'étale

          Photo : Jean Agnès

     

    J'observe après la faille de transmission précédente, beaucoup de "rétropédalages" dans le discours scolaire actuel.

    Ce qui ne recoupe pas la vieille dichotomie entre conservateurs et progressistes : les parangons de vertus, notamment dans les milieux favorables au néo-management de l'école, les officines universitaires ou encore les mouvements "pédagogiques" friands de refondation libérale.

    ***

    Si bien que nous avons du travail :

    - en signalant, exemples trop nombreux à l'appui, qu' On refait le monde ;

    - en rappelant comment s'inscrit au cœur de la masse discursive le projet de limiter la possibilité critique, et en revenant sur le principe d'obscurance ;

    - en insistant sur la nécessité qu'il y aurait pour des chercheurs consciencieux de décrire la conjoncture comme entre-deux, autant que comme postmoderne caverne ;

    se demandant alors s'il s'agit là de la "queue de comète" d'une période régressive, comme en sciences humaines, liée à une tentative de placer le passé récent dans une immémorialité, ou un enracinement plus durable de la fracture de civilisation et de culture ;

    - en proposant, comme il y a vingt ans, un travail actualisation de tout ce qui a fait rupture et ouvert des voies d'espoir, notamment en éducation scolaire tout ce qui relève des principes de  l'éducation nouvelle, au moins dans sa part critique et politique.

    ***

    D'autres thèmes se li(e)ront à ce projet de "théorie pratique". Nous avons moins besoin de récits politiques que de travail critique sur lesquels ils pourraient alors se fonder intelligemment.

     

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  • Je ne sais théoriquement comment m'en sortir avec cette histoire de "numérique". Le terme appartient à l'ordre de ces "archisèmes" dont le discours public, dont le discours scolaire, a le secret.

    Education scolaire, numérique et culture des médias (suite). Pourquoi le "numérique "?

    Celui-ci est bien entré (et ancré) dans la "doxa" de l'époque, et assez rapidement, au fond, comme si, pour se rassurer dans un trop grand trouble de la mutation, on avait besoin de simplismes génériques.

    Cette interrogation se situe en amont de ce qui est aujourd'hui extrapolé sous cette bannière, et qui donne lieu à de grandes envolées, lorsqu'on considère l'ensemble non du "numérique", mais des "nouvelles donnes". ET faute de chantier véritablement scientifique, le risque de la dérive vers la néo-idéologie est plus que jamais présent. Je ne suivrai donc pas ceux qui n'engagent pas l'analyse critique, mais, au contraire, emplissent le terme doxique, considéré comme a priori, comme donné (mais d'où ?) de nouveaux sens : "Les dictionnaires restent un peu perplexes devant le numérique leurs définitions ne renvoient souvent qu’à l’aspect étymologique et technique – un secteur associé au calcul, au nombre –, et surtout aux dispositifs opposés à l’analogique. Dans notre usage, le numérique désigne bien autre chose. C’est pourquoi la question de sa définition mérite d’être posée" (Milad Doueihi, Qu'est-ce que le numérique, PUF, 2013).

    Le tour est joué

    On aura du mal, à coup sûr avec "cultures numériques "et "culture des médias," mais ce sera l'occasion, à n'en pas douter, de réunions incessantes qui, faute de culture du genre, de préparations, de coordinations et de méthode, n'en finiront pas avec la glose, utile à la reproduction de la croyance en de modernes allégories... Comme s'il fallait conjurer le sort de la fin des grands récits.

    Vive l'étymologie

    J'ai pu lire une judicieuse remarque à propos d'un article sur "L’Education au Numérique, Grande Cause Nationale 2014" ? "Que signifie l’abandon des termes "ordinateur" et "informatique" "informatique" au profit du "numérique" ? S’agit-il d’un repeint ou y a-t-il véritablement quelque chose de nouveau ?

    Cela rejoint bien sûr quelques-unes de nos annotations de circonstance.

    La question est fondée : plus que de lexicologie, c'est un problème de classification et de désignation d'un univers culturel.  Le problème est le même que la définition des "médias", que l'on cherche aujourd'hui à noyer dans ce "tout-numérique". D’ailleurs, si l'on ne s'arrête pas à une acception restreinte, on verra que les « médias" recouvre une grande part de ce qui est évoqué sous l'intitulé "numérique ».

    Mais si un tel polysème est commode pour aller vite, c'est vraiment trop vite, trop grand, et trop flou pour penser et agir!

    C'est pourquoi nous avons préférer parler de "nouvelles donnes" pour tout ce qui concerne la configuration en cours, issue de sa mutation générale, avant de proposer une terminologie plus appropriée et nécessairement distinctive. .

    Le principal défaut de ce terme de "numérique" est qu'il réduit la configuration d’ensemble à un aspect particulier de sa générativité. Alors que l'archilexème prétend recouvrir l'ensemble d'un nouveau monde, il le confine à une de ses facettes.

    Autre paradoxe : l'étymologie du terme "numérique" nous renvoie à l'univers computationnel, et nous éloignant de la dimension proprement technique des nouvelles donnes, nous inscrit toujours dans l'ordre du langage.

     ***

    L’informatique désigne le « traitement rationnel, notamment par machines automatiques, de l'information ». Elle fonctionne en « programmes », « computations »… etc.

    Elle est plus vaste que l’ensemble des « machines algorithmique (calcul, mémoire, déterminations : celles-ci sont «  composée d'un assemblage de matériels correspondant à des fonctions spécifiques, capable de recevoir de l'information, dotée de mémoires à grande capacité et de moyens de traitement à grande vitesse, pouvant restituer tout ou partie des éléments traités, ayant la possibilité de résoudre des problèmes mathématiques et logiques complexes, et nécessitant pour son fonctionnement la mise en œuvre et l'exploitation automatique d'un ensemble de programmes enregistrés ».

    Il y a aussi les expansions de ces domaines.  On avait ainsi « télé-matique » comme intersection de l’informatique et de la télécommunication, ou « Cybernétique » comme croisement entre automatique et électronique, etc. On peut aller plus loin  en raison des intersections entre les ordres computationnel, médiatique (textuel ou « textique[1]), plexique. Ce que nous avons travaillé il y a vingt ans dans le champ PMR).

     

    Digital ou analogique ?

    Revenons à l’utilisation du terme particulier de « numérique » pour désigner un nouveau « milieu technique ».

    Apparemment, digital renvoie à ce qui « est exprimé par un nombre, utilise un système d'informations, de mesures à caractère numérique »… Tandis qu’analogique désigne davantage de mode de fonctionnement de la machine par correspondances entre systèmes…

    Le numérique lui renvoie massivement au Nombre. On est donc toujours dans le plan du langage mathématique…  

    J’avais récemment signalée la question du choix de la métonymie « numérique » pour désigner la conformation socio-technique en cours. V. sur le site Educavox 

    « Entre le Numérique et le Digital, quelle image plutôt qu’une autre ?  « Société numérique » ou « digital society ») ? Adopté par le français, l’un renvoie à l’univers computationnel, l’autre, préféré aussi en allemand, au nombre également, mais de manière surtout plus concrète (L’étymologie rapproche de la main : «  calculer sur les doigts » !). Ceci n’est pas sans incidence. Dans les deux cas, on utilise la métonymie de la technique sous-jacente aux outils et aux machines et l’avantage serait alors de renvoyer à une culture de la production technique… Or, le nombre consigne encore ici le primat du langage dans la conception de l’homme. Ce n’est donc pas le moindre paradoxe que l’on ait choisi le rapport au langage et à la mathématique pour désigner un ensemble d’univers d’« objets » et de procédures matérielles et immatérielles : par une étrange persistance de l’antique attachement à la suprématie du logos, et tout en restant dans le domaine de la technique (mécanique/électronique/cybernétique), on inverse par conséquent le point de vue »

    ***

    Il y a aussi des questions étranges comme celle-ci : pourquoi le terme de numérique a-t-il supplanté celui de digital ? C’est un peu à la française la même histoire que celle, au 19è s. du succès emporté par l’écologie sur la mésologie… Revanche inconsciente sur l'Allemagne, qui alors, l'avait emporté! Rapporté à la production  mythique d’ensemble ces questions permettraient d’alimenter par de tels exemples ponctuels une « théorie de la civilisation ».



    [1] Le terme a été consacré à un usage différent (Ricardou 1985)

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  • « Penser l’éducation aux médias et au numérique »

    Ma revue de presse scolaire me fait rencontrer un extrait de déclaration d'un respectable inspecteur général, friand de nouveautés techniques. Et qui déclare énoncer comme "priorités" :

    "Repenser les lieux et les tps d’apprentissage

    et penser une éducation aux médias et au numérique"

    Penser, trop penser

    Source : 123rf

    Cette dernière phrase infinitive, et infinie (in-finie), renvoie plus au discours scolaire qui nous a gâtés ces dernières années en "penser" (on peut tout "penser"...). Il renvoie donc au paradigme du "trop penser" dont j'ai par ailleurs développé l'étude (elle même infinie, car on n'en finit pas, notamment dans les colloques de "sciences humaines" de "penser"). Et indéfinie, tant l'ambiguïté du terme prête à perplexité, d'autant qu'une analyse n'est, là non plus, disponible.

    Il renvoie dans le même élan au paradigme des "éducation à", qui, dans le domaine cité (les médias), et sans doute dans d'autres, est surtout, sous couvert de "transversalité", une "dispense d'enseigner". Il faut s’intéresser aux déterminations historiques, politiques, idéologiques de l’expression

    "Education aux médias" se comprenait, pour des raisons conjoncturelles, comme de communication dans l'espace international, et nous l'avons utilisée il y a un quart de siècle. mais aujourd'hui, en raison des tours pris sous cet intitulé, et de ses dégradation sémantiques, il mériterait d'être revisité ; d'autant qu'il semble désormais "infuser" une vaste zone de flou.

    Or, il est précisément popularisé aujourd'hui, avec un fol retard, comme si la discours avait supplanté le réel, et avait figé ce qui avait été un temps une dynamique.

    Il ne s'agit donc pas non plus ici de "repenser" un domaine à l'intitulé "vieilli". Cela pourrait passer, au sens où la masse des travaux, et leur qualité, engagés il y a plus d'un quart de siècle, suffirait pour une mise à plat, et une clarification. S'il s'agit du « rapport éducatif scolaire aux médias", il serait correct d'effectuer alors une synthèse des quatre dernières décennies, et de recourir à un éclairage plus général : philosophie de l’éducation et « éducation seconde », pédagogie, philosophies de la technique, théories des transferts,  etc.

    Las! Noyons encore le poisson. Savoir dans quel but, voilà l'affaire.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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